Cher(e) ,
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Abidjan, 11-11-2021
Chers hôtes ivoiriens,
Chers
invités,
Chers
AfricTivistes,
En
novembre 2015, nous nous sommes réunis à Dakar, dans la capitale sénégalaise,
pour porter ensemble des idéaux de changement reposant sur des valeurs communes
d’innovation, d'entraide, de partage, de soutien mutuel et de don de soi. Nous
venions de commencer et il fallait trouver des réponses à la restriction de
l’espace civique ainsi que les menaces qui pèsent sur les activistes
pro-démocratie.
En
juin 2018, nous nous sommes réunis à Ouagadougou dans la capitale Burkinabé,
pays du très inspirant Thomas Sankara. Ce fut une occasion pour nous de tendre
la main aux autorités politiques. Nous avions eu l’honneur de recevoir le
Président du Faso, Monsieur Roch Marc Christian Kaboré à qui nous avions fait
passer un message à l’encontre de ses homologues africains afin qu’ils cessent
de considérer les activistes pro-démocratie comme des opposants politiques.
Durant ce deuxième Sommet de Ouaga2008, nous avions pris l’engagement d’être de
nouvelles forces de contribution.
Aujourd’hui, nous portons plusieurs projets
numériques dont le Local Open GovLab. Pendant que nous lancions ce troisième
Sommet, 7 membres de l’organisation aux compétences diverses sont actuellement
déployés dans 7 collectivités locales de la sous-région pour mettre en œuvre
notre parcours assisté à la Gouvernance Locale Ouverte.
Ils
ont laissé derrière eux famille et travail pour se consacrer pendant 6 mois au
service d’une commune. Ils vont assister les maires, former les équipes
municipales, déployer des solutions numériques de gouvernance locale et
redynamiser les cadres de concertation citoyenne.
C’est
cela le sens de notre engagement car j’ai la conviction que si de
jeunes africains grandissent dans un environnement de gouvernance locale
ouverte, à leur maturité citoyenne, ils auront une relation différente avec
l’administration publique et avec la démocratie. Le projet Local Open GovLab
(LOG) associe à la fois, une réponse à une demande locale, administrative et
une politique d’aide à l’insertion professionnelle par le biais du numérique.
Je voudrais ici rendre
un vibrant hommage et remercier ces Volontaires AfricTivistes pour ce don de
leur temps, de leur savoir, de leur énergie et pour tous les sacrifices qu’ils
acceptent de supporter afin de servir leur continent.
Chers
invités,
Chers
AfricTivistes,
Je
ne pourrais m’adresser à vous ce matin sans une pensée pieuse à toutes ces vies
emportées par la Covid-19. Si 2020 nous renseigne sur l’incapacité du monde à
faire face à une pandémie virale, chez AfricTivistes, elle nous aura enseigné
sur l’incertitude des agendas programmatiques. Rien de tout ce qui a été
planifié n’a été exécuté dans les conditions prévues, y compris ce Sommet qui
devait se tenir à Nairobi.
Devenue
une véritable force de proposition, AfricTivistes a su développer une bonne
partie de ses projets grâce au digital comme outil et champ d’action. Surtout
que le numérique a été pendant tout ce temps la solution idoine pour bon nombre
d’organisations, en tant qu’outil de gouvernance et de gestion.
Sans
internet, le monde ne se serait pas organisé pour apporter des réponses
articulées et adaptées. Sans internet et les smartphones, l’Afrique aurait vécu
2020 d’une autre manière.
C’est
par la mobilisation et le volontariat que des centaines de jeunes africains ont
contribué à la riposte contre la crise sanitaire. Cette vague déferlante
d’initiatives sociales et de projets citoyens portés par de jeunes en réponse à
la pandémie est une preuve que le numérique
et internet ont servi de catalyseur pour porter le continent.
Ce continent que nous aimons et chérissons
tant. Nous l’avons hérité de nos parents et grands-parents mais nous l’avons
aussi emprunté à nos fils et petits-fils. Nous avons cette responsabilité de
l’entretenir et de le rendre meilleur en le léguant à nos petits enfants.
Notre
cher continent a traversé beaucoup d’étapes et il en a raté plusieurs. C’est
pourquoi, il est temps qu’on tire sur la sonnette d’alarme pour que cette
nouvelle opportunité qu’est la révolution numérique ne nous passe pas sous les
yeux.
Ce
continent a raté plusieurs fois la chance de bâtir une véritable unité
africaine. Il a connu des leaders forts et à la vision fédératrice mais notre difficulté
à toujours résidé dans notre capacité à s’entendre sur l’essentiel. Nos pays
ont accédé à l’indépendance dans la dispersion et cela a réduit à néant les
projets d’une unité.
Il
est clair qu’aujourd’hui, la plus grande faiblesse de l’Afrique réside dans sa
désunité et dans notre incapacité à aborder ensemble les enjeux de l’heure et à
proposer des solutions efficaces, adaptées en préservant les intérêts du
continent.
Nous
avons hérité d’un continent riche mais FAIBLE sur le plan politique. Faible sur
le plan de la vision économique, désuni sur le plan des idéaux et dispersé dans
nos ambitions.
Nos maux
d’hier constituent nos fardeaux d’aujourd’hui. Nos tares d’hier nous font subir
les 3 précédentes révolutions industrielles qui ont façonné le monde. Nous
avons regardé les autres faire et nous dépendons de leur technologie.
Aujourd’hui, nous risquons de subir cette révolution numérique si nous
commettons les mêmes erreurs.
Plus
de 130 ans après le partage systématique de l’Afrique par les puissances
coloniales, le continent affiche une toute nouvelle carte aux couleurs des supers puissances du numérique.
Nous
dépendons de dons de matériels informatiques pour nos administrations. Nous
subissons l’alimentation en haut-débit de nos villes. Nous courons toujours
derrière la connexion en fibre optique. Nous attendons la fourniture effective
en réseau 3, 4 ou 5G.
Nous
confions la construction et l’équipement de nos data-center aux puissances
étrangères. Notre continent est en train d’être partagé à nouveau sous nos yeux
et regards impuissants. Nous sommes en train de créer une nouvelle dépendance.
Que
propose l’Afrique sur la table des discussions sur la gouvernance d’internet ?
Que proposent nos autorités politiques comme réponse dans un monde où les
principaux enjeux tournent autour de l’économie numérique, autour des droits et
législations du cyberespace ou de la démocratie participative. Notre capacité
collective à prendre à bras le corps les challenges du numérique est faible et
souffre d’une volonté commune.
Dans
une telle configuration, le continent perdrait toute son indépendance et sa
souveraineté numérique et se ferait recolonisé dans un futur proche. D'où la
nécessité d’un réaménagement du territoire numérique africain s’appuyant sur
des ressources, sur des infrastructures et sur des usages locaux.
Le
développement d’Internet a eu lieu grâce à des principes de générosité, de
partage, de don de soi, de bénévolat et une culture d’amour de l’autre et de
son développement. Sans générosité, nous resterons que de simples consommateurs
et jamais des forces de propositions sur la scène internationale.
Nous
ne devons plus être simples spectateurs et éternels consommateurs. Nous devons
peser de tout notre poids sur ce rendez-vous du numérique et cela nous ne le
ferons pas seuls en tant qu’acteurs de la société civile.
Cela
relève d'une démocratie participative, d’une démarche inclusive. Cela demande
bien sûr de la collaboration mais surtout une co-construction entre les autorités publiques, les autorités de régulation, le secteur privé et la société civile.
Qui
est celui qui portera les combats pour tous ces défis ? Aucun de nos pays ne
pourra les affronter seul. Encore une fois, nous avons rendez-vous avec
l’histoire. Nous devons choisir d’affronter cette transformation numérique ou
de la subir.
Je
vous invite chers participants, chers AfricTivistes, à nous unir davantage pour
qu’ensemble nous puissions à travers la Déclaration d’Abidjan, faire de fortes
propositions et inciter nos Etats à prendre garde aux risques liés à la perte
de la souveraineté numérique ainsi qu’aux cyber-menaces qui pourraient nous
guetter.
C’est
aussi une occasion pour nous AfricTivistes d’aider à orienter les politiques
publiques sur des règles d’éthique et d’accompagnement structurel de cette
transformation digitale.
Je
ne pourrais terminer sans vous renouveler à mon nom et au nom du comité
d’organisation, mes sincères remerciements d’avoir accepté de prendre part à ce
troisième Sommet.
Akwaba
et très bonne session
Cheikh
Fall
Président,
AfricTivistes
ENGLISH
Our dear Ivorian hosts,
Dear guests,
Dear AfricTivistes,
In November 2015, we gathered in the Senegalese capital, Dakar, to bring together ideals of change based on common values of innovation, mutual support, sharing and giving back to our communities. We had just started and needed to find answers to the restriction of civic space as well as the threats to pro-democracy activists.
In June 2018, we met in Ouagadougou in the capital of Burkina Faso, the country of the inspiring Thomas Sankara. It was an opportunity for us to reach out to the political authorities. We had the honour to receive the President of Burkina Faso, Mr Roch Marc Christian Kaboré, through whom we sent a message to his African counterparts to stop considering pro-democracy activists as political opponents. During the second summit #Ouaga2018, we made a commitment to be pro-democracy forces.
Today, we have several digital projects, including the Local Open GovLab. While we are kick starting this third Summit, 7 members of the organisation with diverse skills are currently deployed in 7 local governments in the West Africa sub-region to implement our support to Local Open Governance in the continent.
They have left behind their families and work to dedicate themselves to the service of a municipality for a 6-month period. They will be providing assistance to mayors, training municipal teams, deploying digital solutions for local governance and revitalising citizen consultation frameworks.
This is the meaning of our commitment because I am convinced that if young Africans grow up in an environment of open local governance, when they reach maturity as citizens, they will have a different relationship with public administration and with democracy. The Local Open GovLab (LOG) project combines a response to a local, administrative demand while helping people find employment through digital means. I would like to pay tribute to and thank these AfricTivistes Volunteers for giving their time, knowledge, energy and for all the sacrifices they accept to make in order to serve their continent.
Dear guests,
Dear AfricTivistes,
I would be hard pressed to address you this morning without thinking about all the lives lost to Covid-19. If 2020 tells us about the world's inability to cope with a viral pandemic, then at AfricTivistes it taught us about the uncertainty of programmatic agendas. Nothing that was planned was executed as planned, including this Summit that was to be held in Nairobi.
As a genuine driving force of ideas/proposals, AfricTivistes has been able to implement many of its projects using digital technology as a tool and a field of action. Especially since digital technology has been the ideal solution for many organisations as a governance and management tool.
Without the internet, the world would not have been organised to provide articulate and appropriate responses. Without the internet and smartphones, Africa would have experienced 2020 in a different way.
It is through mobilisation and volunteerism that hundreds of young Africans have contributed to the response to the health crisis. This surge of social initiatives and youth-led citizen projects in response to the pandemic is proof that the digital and internet have served as a catalyst to propel the continent.
This continent that we love and cherish so much. We have inherited it from our parents and grandparents but we have also borrowed it from our sons and grandsons. We have a responsibility to maintain it and make it better when passing it on to our grandchildren.
Our beloved continent has gone through many stages and missed opportunities presented by many others. That is why it is time to sound the alarm so that this new opportunity, the digital revolution, will not pass us by.
This continent has, several times, missed the chance to build true African unity. It has had strong leaders with a unifying vision, but our difficulty has always been our ability to agree on the fundamentals. Our countries gained independence in a disjointed way, and this has destroyed the plans for unity.
It is clear that today, Africa's greatest weakness lies in its disunity and in our inability to tackle the current challenges together and to suggest effective, appropriate solutions that preserve the continent's interests.
We have inherited a rich but politically WEAK continent. Weak in terms of economic vision, disunited in terms of ideals and divided in our ambitions.
Our past woes are our present burdens. Our failings of yesterday are our liabilities today. Our failings of yesterday have made us endure the 3 previous industrial revolutions that have shaped the world. We have been watching others do it and we have been depending on their technology. Today, we are in danger of enduring this digital revolution if we make the same mistakes.
More than 130 years after the systematic partitioning of Africa by the colonial powers, the continent has a whole new map in the colours of the digital superpowers.
We depend on donations of computer equipment for our administrations. We suffer from the broadband supply to our cities. We are still chasing the fibre optic connection. We are waiting for the actual provision of 3, 4 or 5G networks.
We entrust the construction and equipment of our data centres to foreign powers including our sensitive national documents. Our continent is being divided up again before our helpless eyes. We are creating a new dependency.
What does Africa offer on the table of discussions on internet governance? What are our political authorities proposing as a response in a world where the main issues revolve around the digital economy, around cyberspace rights and legislation or participatory democracy? Our collective capacity to tackle digital challenges is weak and lacks a common will.
In such a configuration, the continent would lose all its independence and digital sovereignty and would be recolonised in the near future. Hence the need for a reorganisation of the African digital territory based on local resources, infrastructures and practices.
The development of the Internet has taken place thanks to the principles of generosity, sharing, self-giving, volunteering and a culture of love for others and their development. Without generosity, we will remain mere consumers and never force proposals on the international scene. But the million dollar question is what are we going to do about it? Will our generation and will Africa continue the dependency or turnaround and be a catalyst in the digital world?
We must no longer be mere spectators and permanent consumers. We must throw all our weight behind this digital opportunity, and we will not do this alone as civil society actors.
This is a matter of inclusive and participatory democracy. It requires collaboration, of course, but above all co-construction between public authorities, regulatory bodies, the private sector and civil society.
Who will lead the fight for all these challenges? None of our countries can face them alone. Once again, we have a historic opportunity. We must choose to face this digital transformation or to be subjected to it.
I urge you, dear participants, dear AfricTivistes, to unite further so that together we can make strong recommendations through the Abidjan Declaration and encourage our States to beware of the risks linked to the loss of digital sovereignty and the looming cyber threats.
It is also an opportunity for us AfricTivistes to help guide public policies on ethical rules and structural support for this digital transformation but also building capacity.
I cannot end without renewing sincere appreciation to you, on my behalf and that of the organising committee, for accepting to take part in this third Summit.
Akwaba and enjoy your stay.
Cheikh Fall
President, AfricTivises